Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

let[1], un Faujas[2], un Moreau[3], et tu as très fort raison.

À quoi bon, demandes-tu ensuite, cette multitude d’académies dont le royaume fourmille, et qu’ont-elles fait jusqu’ici pour justifier leur institution ? Ne confonds pas, de grâce, les académies de provinces avec les académies de la capitale. Les premières sont des associations formées par la vanité de petits importants qui cherchaient à jouer un rôle, et par l’ennui de petits amateurs qui ne savaient comment tuer le tems. Mais les dernières sont des enfants de l’orgueil des ministres de nos rois. De graves politiques les ont regardées comme des excroissances nécessaires dans un grand empire, ne fût-ce que pour servir au faste du monarque. J’aurais moins de peine à être de leur avis, si ces excroissances de la tête ne contribuaient pas à exténuer tout le corps.

Mais les abus dont tu te plains ne sont pas les seuls. De toutes ces sociétés instituées pour perfectionner les connaissances humaines, sache qu’il n’en est pas une seule qui aille au but de son institution, pas une seule qui n’ait une marche opposée. Sans doute, les efforts des savants, qui travaillent au bien de la société, ne doivent pas rester sans récompense : mais pour apprécier leur mérite, il faut des connaissances qu’un ministre n’a point, et ne doit point avoir. Pour répandre avec discernement les grâces du prince, la seule règle à suivre serait de ne les accorder qu’à ceux dont les travaux ont procuré quelque avantage

    versée de la Manche en ballon, en 1785, il reçut un don de 12 000 livres et une rente de 1 200 livres.

  1. Morellet (André), homme de lettres et économiste (1727-1819). Après son intervention auprès de lord Shelbrune, son ami, pour assurer la paix entre l’Angleterre et la France, il reçut une pension royale de 4 000 livres.
  2. Faujas de Saint-Fond (Barthélémy), géologue (1741-1819), adjoint au Muséum, puis commissaire du roi pour les mines.
  3. Moreau de la Rochette (François-Thomas), agronome (1720-1791), inspecteur général des pépinières royales.