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le charme de l’histoire

les regardâmes sortir sur la levée. Chabot parut ; pour moi qui ne l’avais jamais vu qu’en soutane grasse, je ne l’aurais pas reconnu : petit, mais bien fait, il avait les bottines les plus élégantes, une culotte de soie, une veste d’étoffe rouge brodée en bordure, un frac brun, une cravate blanche et bordée, une demi-coiffure négligée, quoique poudrée, et un bonnet rouge brodé, en forme de bonnet de police, sur l’oreille. Il cabriolait sur le quai, appelait ses convives par leurs noms, les prenait par dessous le bras et leur disait des choses fort plaisantes, car ils riaient par écho. Cette horde s’achemina gaiement vers la Société[1] » (II. 179 et 180).

Immédiatement après ce passage, qui fait involontairement penser à certaine dépêche recommandant aux amis du gouvernement, pendant l’invasion de 1870, d’être gais, Dufort, sans transition, sans réflexion, écrit ces lignes : « Lorsque je me rappelle que, simple particulier, isolé chez moi à la campagne, je n’ai pas eu dans cinq ans de révolution un seul jour où je n’aie été tourmenté, soit par le récit vrai des plus tristes évènements, soit par des inquiétudes fondées ; qu’il en a été ainsi par toute la France ; que ce département même a été un des moins éprouvés, si l’on veut le comparer aux autres, je certifie qu’un homme qui vit dans

  1. Le club de Blois.