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les contes de perrault

tation magique : c’est le « Sésame ouvre-toi ! » des Mille et une Nuits ; on sent, malgré soi, qu’il faudra l’intervention d’une fée pour que la « bobinette » fasse ce mouvement extraordinaire.

On dit qu’il n’est plus de mode aujourd’hui de faire lire aux enfants les contes de Perrault. On veut pour eux des lectures qui ne les trompent pas, et, afin de leur enseigner tout de suite la science sans erreurs, on leur donne des romans scientifiques. Peut-être est-ce dommage, non pas de leur offrir des livres où ils ne trouvent, parait-il, que la vérité, mais de leur refuser le monde des fées ; là, du moins, le conteur ne présente pas des hypothèses pour des certitudes. En les laissant grandir avant de leur expliquer les découvertes modernes, on aurait l’avantage de ne leur enseigner plus tard que le dernier état de ces découvertes. Souvent, en cette matière, la vérité d’aujourd’hui n’est pas celle de demain ; rien n’est fragile et changeant comme cette science si fière d’elle-même ; quelqu’éphémères que soient les bulles de savon de notre imagination, elles durent plus longtemps encore, et peut-être ne nous trompent-elles pas davantage. Si les contes de Perrault sont bannis de la bibliothèque de l’enfance, ils ne resteront pas cependant E.ans lecteurs. Ils plaisent surtout quand on est arrivé à l’âge où l’on peut avouer son goût pour les