Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/264

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On leur en offrit de nulle valeur,qu’ils rejetèrent avec indignation. Là-dessus le maître des offices Ursace, caractère dur et emporté, traita rudement les ambassadeurs ; et ceux- ci, de retour chez eux, soulevèrent sans peine par un récit exagéré le ressentiment des barbares, qui se crurent méprisés.

(8) Ce fut à cette époque, ou peu de temps après, qu’éclata en Orient la révolte de Procope. Valentinien en reçut la nouvelle au moment où il entrait à Paris, le jour des calendes de novembre.

(9) Il venait de donner l’ordre à Dagalaif de se porter à la rencontre des Alamans, qui, après avoir, sans coup férir, tout dévasté près de la frontière, commençaient à étendre leurs ravages à l’intérieur. L’annonce de cette commotion de l’Orient l’empêcha de prendre des mesures encore plus énergiques, et le jeta dans un trouble extrême. Il ne savait si Valens était mort ou vivant ;

(10) car Équitius, dont il tenait cette nouvelle, n’avait fait que transmettre mot pour mot un rapport du tribun Antonin, commandant un corps de troupes au fond de la Dacie, lequel n’était lui-même instruit que vaguement du fait principal, et seulement par ouï-dire.

(11) Valentinien se hâta d’élever Équitius à la maîtrise ; et, de peur que le rebelle, en possession déjà de la Thrace, ne songeât à entamer le territoire pannonien, lui-même se préparait à rétrograder vers l’Illlyrie. Un souvenir récent justifiait son appréhension ; c’était l’incroyable rapidité avec laquelle Julien naguère avait franchi le même espace, devançant, déconcertant tous les calculs par sa présence inopinée ; et cela devant un adversaire jusque-là toujours victorieux dans les guerres civiles.

(12) Mais les conseils ne manquaient point à Valentinien pour tempérer l’empressement de revenir sur ses pas. On lui montrait dans ce cas la Gaule menacée d’extermination, et la nécessité d’un bras ferme pour sauver ses provinces déjà compromises. Des députations des villes principales venaient joindre leurs instances à ces objections. Pouvait-il les abandonner dans cette crise imminente, quand pour imposer aux Germains c’était assez de sa présence, de la terreur de son nom  ?

(13) Après avoir longtemps considéré la question sous toutes ses faces, il finit par se rendre à ces avis. Réfléchissant que Procope n’était que son adversaire personnel et celui de son frère, tandis que les Alamans étaient les ennemis de l’empire, il prit définitivement le parti de ne pas sortir de la Gaule,

(14) et se rendit en conséquence à Reims. Cependant, comme il n’était pas non plus sans inquiétude d’une tentative sur l’Afrique, il en confia la défense concurremment au notaire Néotérius, depuis consul, et à Masaucio, simple protecteur, il est vrai, mais ayant fait sous le comte Crétio, son père, une longue étude de la province. Il leur adjoignit encore le scutaire Gaudence, sur la fidélité duquel il savait pouvoir compter.

(15) De violentes tempêtes à cette époque se déchaînaient et à la fois sur tout l’empire. J’en ferai successivement le récit, en commençant par les affaires d’Orient ; la guerre avec les barbares viendra ensuite. Comme les mêmes mois à peu près ont vu les faits s’accomplir dans les deux parties du monde romain, une narration qui sauterait de l’un à l’autre, pour obéir à un ordre