Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/333

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

accepter le combat dans des conditions aussi inégales. Il se contenta d’appuyer de côté en bon ordre, et, par une manœuvre hardie, occupa la ville nommée Contensis, que Firmus, vu sa position écartée et la difficulté de ses approches, avait choisie pour en faire un dépôt de prisonniers. Théodose rendit la liberté à tous les captifs, et sévit avec sa rigueur ordinaire contre les traîtres et les partisans de Firmus.

(40) Le ciel continuait à favoriser les plans de Théodose. Averti par de sûres intelligences que Firmus avait pris refuge chez les Isaflenses, il entra sur leur territoire, et, sur leur refus de livrer la personne de son adversaire, ainsi que son frère Mazuca et le reste de sa famille, déclara la guerre à toute la tribu.

(41) Une rencontre sanglante eut lieu ; les barbares y montrèrent une telle furie, que Théodose, pour leur résister, dut recourir à l’ordre de bataille circulaire. Enfin les Isaflenses furent rompus, et firent une perte considérable. Firmus, qui s’était montré partout où était le danger, ne dut la vie qu’à la bonté de son cheval, qui était dressé à courir parmi les rochers et les précipices. Mazuca, mortellement blessé, fut pris.

(42) On voulait l’envoyer à Césarée, où il avait laissé de sanglants souvenirs ; mais il parvint à se donner la mort en élargissant sa plaie de ses propres mains. Sa tête, séparée du tronc, fut du moins offerte aux regards des habitants de cette ville, qui la reçurent avec des transports de joie.

(43) Le vainqueur, par de justes sévérités, fit ensuite payer à la nation l’opiniâtreté de sa résistance. Evasius, riche citoyen, son fils Florus et quelques autres, convaincus d’avoir favorisé sous main l’agitateur, périrent tous par le bûcher.

(44) De là s’enfonçant dans le cœur du pays, Théodose attaqua résolument la tribu des Iubaleni, le berceau, disait-on, du roi Nubel, père de Firmus. Mais il trouva sur son chemin une barrière de hautes montagnes, où l’on ne pénétrait que par les plus tortueux défilés ; et, bien qu’il eût passé sur le ventre à l’ennemi, et lui eût tué beaucoup de monde, craignant de s’engager dans une région si favorable aux surprises, il se replia sans perte sur la place forte d’Auzia. La féroce tribu des Iesalenses y vint faire sa soumission, et lui offrir des secours en hommes et en vivres.

(45) Enfin Théodose, avec une confiance justifiée par ses précédents succès, voulut faire un dernier effort pour s’emparer de la personne même de l’auteur de la guerre. Pendant une longue station qu’il fit à la place forte appelée Mediana, attendant avec anxiété le résultat de divers plans concertés pour se faire livrer Firmus,

(46) il apprit tout à coup que l’ennemi était retourné chez les Isaflenses. Alors, sans se laisser arrêter par ses premières craintes, il se porte sur-le-champ à marches forcées contre ces derniers. Un roi, nommé Igmacen, puissant et considéré dans ces contrées, se présente audacieusement devant le général, et, d’un ton de menace : "D’où viens-tu ? dit-il ; et que viens-tu faire en ce pays ? — Je suis, répond tranquillement Théodose, l’un des comtes de Valentinien, souverain de l’univers. II m’envoie ici le débarrasser d’un brigand. Et tu vas me le livrer sans délai (tel est l’ordre de mon invincible