Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/672

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diment. Il est certain qu’un soldat formé à tous ces exercices, non seulement ne craindra pas d’en venir aux mains avec l’ennemi, quel qu’il soit, mais il y trouvera du plaisir.

chapitre v.
De la taille des nouveaux soldats.

Je sais que la grande taille a été toujours recherchée dans le nouveau soldat, puisque l’on exigeait pour la cavalerie légère, et pour les premières cohortes de chaque légion, des hommes de six pieds[1], ou du moins de cinq pieds dix pouces ; mais le peuple romain était plus nombreux alors, et plus porté à la guerre. Le goût des emplois civils n’emportait pas, comme à présent, la plus brillante jeunesse : ainsi, dans l’impossibilité où nous sommes aujourd’hui de réunir la taille et la force, il faut préférer la force. Homère nous y autorise en nous représentant Tydée comme un homme de très-grand courage, quoique de très-petite taille.

chapitre vi.
A quelles marques, soit du visage, soit de la complexion, on reconnaît les jeunes gens propres à la guerre.

Celui qui sera chargé de choisir des soldats ne saurait trop chercher dans les yeux, dans les traits du visage, dans la conformation de toutes les parties du corps, ce qui promet un bon soldat ; car certains signes, de l’avis de très savants hommes, annoncent la vigueur, non seulement dans les hommes, mais encore dans les chevaux et dans les chiens. On peut l’observer même dans les abeilles, si l’on en croit le poète de Mantoue. « Il y en a, dit-il, de deux sortes ; on reconnaît l’activité des unes à leur figure agréable, aux petites écailles brillantes dont elles sont couvertes ; la paresse des autres, à leur figure hideuse, à la langueur, à la pesanteur avec laquelle elles se traînent. » Il faut donc examiner si le jeune homme qu’on destine aux travaux de Mars a l’œil vif, la tête droite, la poitrine large, les épaules garnies de muscles, les bras vigoureux, les doigts longs, le ventre peu étendu, la jambe menue, le gras de la jambe et le pied débarrassés de chairs superflues, mais resserrés au contraire par la dureté des nerfs qui s’y entrelacent. Lorsque vous apercevrez ces marques, préférez-les à la haute taille ; car il vaut beaucoup mieux qu’un soldat soit vigoureux que grand.

chapitre vii.
Des métiers qu’on doit admettre ou refuser dans la milice.

Il y a encore des attentions à faire sur les métiers d’où l’on doit tirer les soldats, ou qui les excluent. Pour moi, je voudrais qu’on éloignât des camps les pêcheurs, les oiseleurs, les pâtissiers ou gens de cuisine, les tisserands, et en général tous ceux qui exercent des professions qui regardent les femmes. On fera bien, au contraire, de préférer les forgerons, les charpentiers, les bûcherons et les chasseurs de bêtes fauves, si le salut de la république dépend de choisir pour soldats, non seulement les mieux faits, mais les plus courageux. Si les forces de l’em-

  1. Le pied romain était plus petit de treize lignes que notre pied de roi : ainsi un soldat romain de six pieds n’avait, suivant notre mesure, que cinq pieds cinq pouces six lignes.