Page:Marcet - L’économie politique en vingt-deux conversations, 1837.pdf/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
166
L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

C’est très-vrai ; il y a cependant certaines choses, qui sont de l’usage le plus général et le plus important, comme la lumière, l’air et l’eau, et qui, tout indispensables qu’elles sont pour vivre, n’ont point de valeur en échange ; on ne paie point pour les avoir, on ne peut rien obtenir en les offrant.

CAROLINE.

Personne ne voudrait payer ce qui est si abondant, ce que l’on obtient sans faire aucun sacrifice, aussitôt qu’on en a le désir ; mais comme la lumière, l’air et l’eau sont essentiels à notre existence, ils ont sans doute de la valeur.

MADAME B.

En économie politique, nous n’envisageons comme ayant quelque valeur, que les marchandises susceptibles d’être échangées contre d’autres ; pour cela, il faut qu’elles ne soient pas produites en si grande abondance et si aisément obtenues, qu’on les puisse avoir pour rien. Il faut au contraire qu’elles soient assez recherchées pour que les hommes soient disposés à donner quelque chose pour les acquérir. Ainsi les habits, les maisons, les meubles, quoique incontestablement moins utiles que la lumière, l’air et l’eau, ont une valeur en échange.

La nature travaille pour nous gratuitement ; et quand elle nous fournit certaines choses en telle abondance qu’aucun travail n’est nécessaire pour se les procurer, ces choses n’ont aucune valeur échangeable : mais dès que le travail de l’homme devient nécessaire pour mettre une chose à notre usage, cette chose acquiert une valeur ; on en donne un certain prix en argent, ou d’autres choses en échange. La lumière, l’air et l’eau sont des dons gratuits de la nature ; mais si un homme fait une lampe, il faut payer la lumière qu’elle répand : s’il fait un ventilateur, ou seulement un éventail, il faut acheter l’air qu’il nous donne ; et quand l’eau est conduite par des canaux jusque dans nos maisons, ou élevée par une pompe, ou mise de toute autre manière à notre portée par l’art humain, l’eau acquiert un prix.

CAROLINE.

Les ouvriers doivent être payés de leur travail, soit qu’ils pro-