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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

verions-nous quelque ressource dans le cas où cet approvisionnement serait insuffisant ?

CAROLINE.

En ce cas assurément il serait à propos d’importer ce qui nous manquerait ; je ne fais objection qu’à l’usage d’en importer habituellement, et de ne pas compter, en temps ordinaire, sur nos propres produits.

MADAME B.

Si nous ne faisons des demandes aux pays à grains que dans les années de disette, nous éprouverons beaucoup de difficulté à en recevoir. Ces pays-là cultivent les grains pour les nations qui s’en pourvoient habituellement chez elles : mais elles en ont peu à offrir à de nouvelles pratiques, qu’une disette oblige à chercher au dehors les grains qui manquent chez eux ; nous ne pourrions en obtenir à ces termes-là, qu’en parvenant à faire exclure ceux qui nous feraient concurrence. Ainsi l’approvisionnement que nous obtiendrions par cette voie serait insuffisant et si cher, que les classes inférieures du peuple auraient peine à y atteindre. Il y aurait donc grande détresse, si même on évitait le danger de la famine.

CAROLINE.

Pour prévenir de telles calamités nous n’avons qu’à produire dans notre propre pays une quantité de grains assez grande pour que, dans les années moyennes, elle nous donne un abondant approvisionnement ; puis dans les années d’abondance nous aurions la ressource de l’exportation ; et dans les mauvaises années, nous aurions encore des grains en suffisance.

MADAME B.

Il est impossible de produire ce qui peut suffire en tout temps, sans avoir souvent du superflu. Cela est encore plus vrai des grains que de tout autre produit, parce que de tous les produits agricoles, c’est presque le plus variable. Si donc nous voulons en produire une quantité qui nous rassure contre le danger du besoin, il faut consentir à en avoir, dans les années communes, de quoi faire quelque épargne, et dans les bonnes années un grand superflu.