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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

mal ; et lorsqu’enfin le luxe entame les capitaux, nous avons vu que c’est un très-grand mal.

Le grand objet qu’il faut avoir en vue, pour avancer la prospérité générale du pays, est l’accroissement du capital. Mais la législature n’a aucun autre moyen d’obtenir cette fin, que de pourvoir à la sûreté de la propriété. Toute tentative de sa part pour influer sur la manière de disposer du capital ou sur la nature et la grandeur de la dépense, n’est propre qu’à décourager l’industrie.

CAROLINE.

Quiconque augmente son capital en faisant des économies sur son revenu accroît, à ce qu’il me semble, le fonds général destiné à la subsistance des classes laborieuses ; tandis que celui qui dépense une partie de son capital diminue ce fonds de subsistance, et diminue par-là même les moyens d’employer les classes laborieuses à sa reproduction.

Tout homme doit donc considérer comme un devoir, qui lui est prescrit par la morale, indépendamment même de son propre intérêt, de contenir sa dépense dans des limites que son revenu dépasse toujours ; de sorte que, d’année en année, il puisse constamment faire quelque addition à son capital.

MADAME B.

Si l’on demande quelle doit être cette addition, la réponse dépendra de la grandeur du revenu et des motifs de faire de la dépense. Nous ne pouvons que signaler les extrêmes qu’il faut éviter ; d’un côté, une épargne outrée et peu libérale, de l’autre, une folle prodigalité. Entre ces extrêmes, il y a tant de nuances, que chacun doit tracer la limite pour lui-même, conformément à ce que lui dicteront et le bon sens et la conscience, en consultant au besoin les hommes versés dans la philosophie morale, autant que ceux qui s’occupent d’économie politique. Un père qui a une famille nombreuse à élever et à établir, quoique tenu à une plus sévère économie, ne peut faire, sur son revenu, des épargnes égales à celles d’un homme libre de tel engagement.

Mais quelque grand que soit le revenu dont un homme peut jouir, il n’est jamais excusable de négliger l’économie. L’économie est une vertu prescrite à tous ; un homme riche peut avoir des motifs