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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE

— En vérité ! s’écria Jobson, vous me paraissez toujours plus surprenant. Vous ne dormez donc que la nuit ?

— Je ne dors jamais, et je travaille aussi aisément pendant vingt-quatre heures que pendant une minute. »

» Jobson, dont la surprise et la joie allaient toujours croissant, s’occupa alors à déterminer de quelle manière il emploierait le géant. « Il moudra le grain, pensa-t-il, je suis fatigué de le faire ; « et il lui montra les pierres dont il se servait à cet effet, mais ce n’était qu’un jeu pour le géant, et Jobson comprit que s’il pouvait se procurer deux grandes pierres plates comme celles dont on se sert dans les moulins, le géant ferait beaucoup plus d’ouvrage ; malheureusement la carrière était fort éloignée de sa demeure, et, à supposer qu’il pût s’y rendre et couper les pierres en question, comment les transporterait-il jusque chez lui ? »

» Le fardeau ne sera pas trop lourd pour moi, lui dit le géant, partons. »

« Jobson enferma ses outils dans une boîte qu’il plaça sur le dos du géant ; il monta dessus, et ils eurent bientôt atteint la carrière, où ils coupèrent les deux pierres qui, en peu d’instants furent amenées au logis. Une fois qu’elles furent convenablement disposées, le géant se mit à l’ouvrage et travailla comme s’il n’avait fait que cela toute sa vie. La nuit étant venue, les heureux époux l’engagèrent à prendre quelque repos, mais il ne voulut pas y consentir ; pour eux, ils se couchèrent après avoir remercié Dieu de tout leur cœur de ce qu’il leur avait envoyé un si bon ouvrier.

» Et je vous prie, dit Tom, interrompant le marchand, quel était le nom de ce merveilleux géant ?

— Aquafluens.

— Oh ! quel nom difficile à prononcer ! s’écria Betty.

— Les géants ne portent pas les mêmes noms que nous, reprit le colporteur et je vous assure que celui-ci est très-significatif. Mais laissez-moi continuer mon histoire.

« Pendant la nuit les enfants furent éveillés par le bruit que faisait le géant en écrasant le blé ; ils eurent peur ; mais leur mère les rassura, et cette bonne femme, voyant son mari paisiblement endormi auprès d’elle, songea combien elle était heureuse de ne plus le voir obligé de faire un travail aussi dur, et elle appela sur son nouvel ami toutes les bénédictions du ciel.