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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE

» Vaporifer pouvait faire mouvoir plusieurs machines en même temps.

» Les colons bâtirent un vaisseau, et les trois géants se disputèrent à qui le conduirait.

« Il ne peut marcher sans mon assistance, dit Aquafluens.

— Il se traînera comme un escargot, dit Ventosus, si je ne me place sur le tillac pour enfler ses voiles. Confiez-le-moi, et il voguera rapidement sur la surface des eaux.

— Mais il voguera à l’aventure, sans guide et sans but, objecta Vaporifer, tandis que je puis diriger sa course en dépit de vos efforts réunis. »

» Aquafluens fut obligé de céder, car s’il pouvait guider le bâtiment sur un fleuve, il n’en était pas de même sur la mer. Les deux autres géants traitèrent amicalement ensemble, et il fut décidé que Ventosus serait nommé capitaine du vaisseau pour tous les moments où il paraîtrait bien disposé à le diriger vers les lieux qu’on désirait atteindre, mais que, dès qu’il deviendrait mutin et contrariant, Vaporifer prendrait le commandement.

» Les colons se trouvaient alors en état de retourner en Angleterre ou d’aller chercher la terre où ils avaient dû émigrer ; mais, après vingt ans de séjour dans cette île, qu’ils avaient cultivée et embellie, ils s’y étaient attachés, et aucun des anciens ne désirait la quitter. Les jeunes gens nés dans l’île, et qui avaient souvent entendu leurs parents s’entretenir de leur patrie, furent seuls curieux de la visiter ; ils s’embarquèrent avec un chargement de marchandises, produits de leur île, qu’ils vendirent très-bien en Angleterre, et ils revinrent chez eux avec toute sorte d’objets dont la colonie manquait.

» Le commerce s’étant établi entre cette île et l’Angleterre, la colonie atteignit le plus haut point de prospérité, et c’est là la fin de mon histoire. »

— Ah ! quel joli conte plein de géants ! s’écria Tom.

— Je voudrais bien savoir, dit John Hopkins, quelle est l’utilité de cette histoire ? Car Dieu n’envoie pas des géants à notre aide, et quel avantage peut-il y avoir à envier ce que l’on n’a pas et à être mécontent de ce que l’on a ?

— Êtes-vous sûr, reprit le marchand en souriant, que les géants mentionnés dans ce conte n’existent pas parmi vous ? Je vais vous