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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE

— Tu ne crois pas ce que je te dis, ma chère, parce que tu ne me comprends pas. Appelle Tom, il nous lira une fable qui t’expliquera tout cela. »

Tom apporta son livre, et son père le pria de lire la fable des membres et de l’estomac.

Tom, qui avait été quelque temps moniteur à l’école du village, commença d’une voix forte et claire, et nous les laisserons à leur lecture.



DES MACHINES,
OU
DU HAUT PRIX ET DU BON MARCHÉ.


Jackson, pauvre ouvrier en soie, qui gagnait péniblement sa vie, se trouvant trop misérable, se décida à partir pour l’Amérique. Il voulut prendre congé de tous ses amis, et faisait tristement le tour du village, lorsque Hopkins, qui était devant sa porte, l’accosta :

« Vous partez donc pour le Nouveau-Monde, voisin Jackson ? lui dit-il. Je vous souhaite bonne fortune ; on dit que c’est un beau pays ; mais il faut du temps pour y arriver.

— Il faut que je choisisse entre la paroisse et l’Amérique, répondit Jackson, et il ne sera pas dit que je serai un fardeau pour mon pays tant que je serai jeune et robuste. J’ai pris patience pendant longtemps, espérant, à force de travail et d’économie, de me faire un petit fonds ; mais depuis l’invention d’une nouvelle machine, introduite dans nos fabriques, je n’ai plus d’ouvrage ; une de ces machines fait à elle seule le travail de douze ouvriers. Maintenant c’est à qui fabriquera au plus bas prix, et à moins que de travailler gratis comme les machines, qui n’ont ni estomac à nourrir ni enfants à élever, on n’obtient plus d’ouvrage. Je me