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SUR L’ÉCONOMIE POLITIQUE

cela ? parce qu’en France on s’habille avec du drap anglais. »

John Hopkins ne savait que répondre à son fils, qui, certes, n’était pas celui des trois qui raisonnait le plus mal.

« Ce garçon a raison, dit l’oncle Bob ; si vous vous plaignez de ce qu’on préfère ici la soierie française à celle du pays, vous devez aussi regretter que nos draps soient estimés en France. »

Patty sourit ; car elle pensa que Barton n’avait eu aucun tort, et qu’elle pourrait porter le jour de ses noces sa jolie robe de soie.

« Si personne ne faisait usage des marchandises que nous recevons de l’étranger, poursuivit Bob, il serait inutile de les échanger contre celles que nous fabriquons.

— Et cela vaudrait beaucoup mieux, répliqua John ; chaque pays consommerait le produit de ses manufactures.

— Ce serait tant mieux pour Nancy, mais tant pis pour Dick et Tom ; car, ne recevant plus ni rubans ni soieries françaises, nous n’aurions plus à fabriquer la quantité de draps qui représentait le paiement de ces marchandises. Je soutiens donc que chaque pièce de soierie, de dentelle, de batiste, ou de vin, qui nous vient de France, d’Espagne ou d’Allemagne, ou même des Indes orientales ou occidentales (l’oncle Bob aimait à parler des pays qu’il avait vus), nécessite le travail de nos ouvriers, comme si elle était l’ouvrage de leurs mains ; car, que leur importe de faire des pièces de rubans qui seront vendues dans le pays, ou des pièces de draps qu’on exporte à l’étranger ? Tout ce que nos ouvriers demandent, c’est d’être employés. Cela est clair comme le jour : cependant jusqu’ici je n’y avais jamais songé. »

John Hopkins n’était pas très-satisfait de voir son frère se ranger de l’avis de Tom, quoiqu’il commençât à croire qu’ils avaient raison, et que le commerce avec l’étranger ne pouvait faire ni bien ni mal au pays.


DEUXIÈME PARTIE.


Un jour que le seigneur du lieu faisait sa visite chez Hopkins, John lui demanda la permission de lui faire une question, ce qui lui fut accordé avec bonté.