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CONTES POPULAIRES

ront à vous accorder un profit plus considérable ; sinon, qu’ils gardent leurs fermes, et vous essaierez quelque autre moyen de gagner votre vie.

— Il est si aisé, murmura Stubbs de se mettre à tout, surtout à mon âge ! Non, je ferais mieux de me contenter de ce que je gagnerais plutôt que de changer de condition.

— Eh bien ! si les fermiers restent fermiers, ils élèveront leurs enfants à faire autre chose, et lorsque les propriétaires ne trouveront plus du tout à louer leurs fermes, ils finiront bien par en baisser la rente.

— Supposons, John, que nous tirions tout notre blé de l’un de ces pays dont vous parliez tout à l’heure, et que la guerre vint à y éclater ; nous ne pourrions plus communiquer avec ce pays, et nous serions dans un bel embarras !

— Si nous étions en guerre avec le pays qui nous fournirait du blé, nous pourrions en tirer de quelque autre ; car il n’est pas vraisemblable que nous fussions en guerre en même temps avec tous les pays qui produisent du blé.

— C’est ce dont on ne peut répondre dans ces temps-ci, où les révolutions sont à la mode.

— Que voulez-vous dire, maître Stubbs ? Il y a près de vingt bonnes années que nous avons la paix dans notre vieille Angleterre, et j’ai ouï dire qu’on ne se rappelle pas d’avoir vu une paix aussi prolongée ; il est vrai qu’il y a beaucoup de guerres à l’étranger ; mais ce n’est pas nation contre nation, ce sont les peuples qui se révoltent contre ceux qui les gouvernent avec une verge de fer. Du reste, croyez-moi, guerre ou non, ceux qui ont du blé à vendre savent bien se concerter pour l’envoyer au marché ; d’ailleurs, maître Stubbs, je n’ai jamais été d’avis qu’on fit venir de l’étranger tout le blé qui se consomme dans le pays. Cultivez-en autant qu’il est possible sur de bons terrains ; car alors il vous coûtera moins, et vous pourrez le donner à aussi bon marché que celui qu’on fait venir du dehors.

— Mais vous oubliez la grosse rente qu’il faut payer pour un bon terrain, et qui rend le blé aussi cher que celui qui est le produit d’un mauvais sol.

— Non, répliqua John, c’est vous qui oubliez que de Noël prochain en deux ans votre rente sera diminuée si le commerce du