Page:Marchant de Beaumont - Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise.djvu/61

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veuves vinrent y répandre des pleurs ; des mères tressèrent des couronnes de myrtes et de roses qu’elles déposèrent sur la tombe de l’enfant arraché de leur sein ; l’immortelle orna la tombe de l’homme de bien : ces tributs du cœur étaient alors peu ordinaires.

Pendant huit ans les sépultures temporaires se firent presque exclusivement dans les endroits les plus bas de cette enceinte ; quelques sépulcres perpétuels se creusaient seulement de loin en loin sur le plateau. En sortant d’un enterrement, personne n’était tenté de gravir la pente rapide du coteau pour voir de plus près une masure, quelques pierres tumulaires éparses ; de loin en loin, quelques bosquets, une chapelle gothique isolée, des champs sans culture. La perspective de Paris et de ses environs jetait de ce point magnifique ; mais tout autre lieu pour les contempler semblait préférable à un cimetière.

L’opinion publique, qui soumet tout à ses lois, n’avait pas encore placé au nombre des vertus essentielles dans les familles, le respect pour la cendre et la mémoire de leurs proches. Un peuple enivré de gloire, rassasié de victoires, fier de sa prépondérance, devait repousser loin de soi toute pensée triste, tout ce qui aurait pu lui faire songer à la fragilité du bonheur. Les morts sont bientôt oubliés lors-