Page:Marchant de Beaumont - Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vinrent près d’eux prendre leurs places dernières ; les étrangers, considérer dans la tombe les mortels dont la vaillance tourmenta leur repos ; les Français, se ressouvenir de leurs victoires dont le songe évanoui flattait encore leur orgueil. En même temps toute sépulture perpétuelle fut interdite dans les autres lieux funéraires de Paris : ce fut annoncer du mépris pour la cendre de ses proches, que de les y transporter. Le cimetière du P. La Chaise devint ainsi le dernier rendez-vous de tout ce que Paris possédait de grand, d’opulent, d’illustre dans les lettres, dans les sciences, dans les arts ; de distingué dans le commerce, dans l’industrie ; de personnages éminens par des fonctions publiques, d’hommes fameux dans tant de circonstances politiques. Les dépouilles des morts affluèrent, les familles s’y réunirent, toutes les opinions s’y confondirent, l’étranger mêla sa cendre à celle des habitans de Paris. Chacun signala sa piété par des monumens analogues à ses facultés pécuniaires, plutôt qu’au mérite des siens : personne ne voulut se montrer ingrat dès qu’il posséda une âme élevée. L’admiration universelle fut le partage des cœurs excellens dont la sensibilité ne cessait point de rendre dans le secret un hommage sincère à leurs proches, en répandant souvent des larmes sur leurs restes chéris, en entretenant leurs tombeaux, en les