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que le malade prend pour la cause de sa guérison ; mais ils crient si horriblement en chantant qu’on dirait qu’ils vont s’égosiller. Cela étant fait, ils interrogent de nouveau le magicien pour savoir si l’idole est contente ; s’il répond que non, ils se disposent à faire ce qui leur sera ordonné pour l’apaiser ; s’il répond que l’idole est satisfaite, alors les enchanteurs et les magiciens se mettent à table et mangent en grande joie les viandes qui ont été sacrifiées à l’idole et boivent les boissons qu’on lui a consacrées. Après que le repas est fini, chacun s’en retourne chez soi ; et quand le malade a reçu la santé par la grâce du Dieu puissant, ces misérables aveugles en rendent des actions de grâces au démon.

XLII
Du grand combat entre les Tartares et le roi de Mien.


L’an de Notre-Seigneur 1272, il y eut une grande guerre à cause du royaume de Caraiam, dont nous avons parlé au chapitre précédent, et du royaume de Botiam. Car le Grand Khan envoya un des principaux de sa cour, nommé Nescordim, avec douze mille cavaliers, pour mettre à couvert la province de Caraiam de toute insulte. Ce Nescordim était un homme vaillant et prudent, et il avait de bons soldats, bien aguerris. Les rois de Mien (la Birmanie actuelle) et de Bangala (Bengale) sur ces nouvelles furent fort épouvantés, croyant que cette armée venait pour envahir leurs royaumes, et ramassèrent leurs troupes, qui se montaient tant en cavalerie qu’en infanterie à environ soixante mille hommes et deux mille éléphants. Ils campèrent de cette manière, ayant mis douze ou quinze hommes bien armés dans un certain château, et le roi de Mien s’avança avec son armée vers la ville de Vocia, où était l’armée des Tartares, et campa dans les campagnes à l’entour pendant trois jours, ne se méfiant de rien. Nescordim, ayant appris qu’il venait une si grande armée contre