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ÉPISODES BÉDOUINS

heurs pour ce voyage. Ma décision est prise, rien ne peut me retenir.

Vingt-quatre heures après, voici Soleiman.

Il a accepté et désormais ne parle plus que pour régler les détails du voyage. Devant Ahmed et Ali, mes fidèles serviteurs, je lui fais jurer protection et respect. Il parle un arabe différent du mien, de telle sorte qu’Ahmed et Ali sont nécessaires pour ne pas commettre d’erreur ou d’impair dans tout ce qu’il calcule, prévoit et m’explique posément.

Devant mes braves domestiques attentifs, Soleiman promet, dans un langage imagé, de m’éviter toute fatigue, d’assurer mon confort. Cette mission sera plus précieuse pour lui que sa vie même.

Afin de sceller le contrat, il répète trois fois, en baissant les yeux : « Ce mariage ne sera qu’un simulacre pour le gouvernement, Soleiman te respectera comme sa propre sœur. »

Ce serment engage son honneur et il le tiendra. Au demeurant, il l’a tenu.

L’affaire fut vite conclue. Mais, avant d’aller plus loin, il me faut donner certains détails sur la situation où je me trouvais depuis quelque temps. Le régime dotal, sous lequel j’avais été mariée à Pierre d’Andurain, constituait pour nous une lourde entrave. On m’avait bien ligotée. Aussi m’étais-je trouvée contrainte à chercher un moyen d’annuler ce régime qui me laissait sans le sou. Il n’y avait à cela qu’un remède : le divorce.

Nous en parlâmes longtemps. C’était un parti qui, nécessairement, devait paraître étrange et nous susciter des inimitiés. Nous nous y résolûmes pourtant et divorçâmes en nous entendant à ravir. Pierre d’Andurain restait mon vrai mari et continua d’être pour moi l’ami le plus sûr. Mais, au point de vue civil, j’étais libre.