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MYSTIQUE

menace de mort sur ma tête. Mais ce ciel impassible, ce soleil accablant, cette mer lisse me portaient à l’accepter sans amertume et sans regrets.

La curiosité qui m’inspire le besoin de voyager et de changer sans répit d’horizons faisait sans cesse franchir à mon esprit les limites de la vie matérielle. L’inconnu de la mort me fascinait. Je n’appréhendais donc rien. Mais je me rendais compte que ma béatitude présente pouvait provenir d’une possible prescience de l’avenir et d’une intuition de cette suprême délivrance qui accompagne la divulgation du dernier secret. Chaque soir, accoudée au bastingage, sans désir et sans arrière-pensée, je regarde l’astre choir au lointain. Ma félicité morale est si intense que mon physique lui-même en est influencé. Bien-être total, immatériel… est-ce l’extase ?…

La réalité reprend toujours ses droits. Nous allons arriver à Djeddah, Ahmed s’occupe de nos costumes de pèlerins. Les bagages de l’Hindou sont, à ce sujet, notre ressource à tous. Soleiman va y trouver le tissu éponge pour ceindre les reins et couvrir l’épaule gauche en laissant nue l’épaule droite, ce qui est rituel en pèlerinage. La tête et les pieds doivent rester nus pour les hommes.

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