Page:Marga Andurain - Le Mari passeport, 1947.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

205
ATTENTES

Dans huit ou dix jours vous reviendrez, dit Akram, il faut avant tout cette réponse d’Égypte.

— Pitié, pitié, je voudrais me justifier, en finir,

— Sabour, patience.

Le soir, visite de deux membres du consulat, le ministre n’a pu venir. Il est malade. Il a une forte fièvre. Ces chaleurs le fatiguent… Sombres pressentiments… Mon imagination est en délire, on va l’empoisonner, il va mourir et tout mon espoir est en lui !

26 mai. — On m’apporte une table. Le gouvernement a été longtemps avant de permettre, dans une prison, cet objet de luxe… une petite table en bois blanc… je nettoie toute ma cellule à la crénoline, car les araignées semblent s’être reproduites en masse ces derniers jours. Mes gardes se pâment sur mon installation.

— Tu es comme un maître d’école, s’exclament-ils.

En fait, je suis tristement assise devant ma petite table, mais cette posture est inconnue au Hedjaz. Seuls les professeurs et quelques ministres s’assoient sur des sièges devant des tables. Généralement on est par terre ou accroupi sur des banquettes, genre divan, qui entourent presque toutes les salles. Jaber Effendi lui même, le plus sincèrement du monde, s’extasie : « Quelle belle pièce ! » Je ris malgré ma détresse.

Tous les quinze jours, un homme svelte, très bronzé, jambes nues et drapé de blanc, chante dans les rues sur un rythme bizarre. Je m’informe. Il annonce les arrivées et les départs des bateaux, il énumère les noms et les ports où le navire fera escale. Il remplace l’affiche, la publicité, l’agence de renseignements, il donne aussi les billets de départ.

Partir… départ… quels mots ! Je frémis.