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ORAISON FUNÈBRE

voulu remettre au chemin de vérité, s’ils ne vouloient se recongnoistre & amender, selon le précepte de S. Paul qui commande d’éviter l’hérétique après la première ou seconde admonition, incontinent les déchasseoit de sa Maison, de sa famille & de sa compaignie.

Que si tu m’estimes ne dire vray, les Domestiques, Officiers & serviteurs de Marguerite soient ouïs &, avec euls, tant & de si grands personnaiges, qui la congnoissoient de longue main, soient aussi ouïs, car ceuls là sont bons, suffisants & véritables tesmoings de ce que je vous dy &, s’ils ne peuvent encor satisfaire, la vie de Marguerite en portera avec euls tesmoignage, laquelle, tant en faicts qu’en parolle, donneoit un singulier exemple de piété & religion. Que si ne les hommes ne la vie d’elle ne peuvent divertir les babillards obstinés en leur malice de ceste perverse opinion qu’ils hont, nous avons entre les mains ses escripts, qui convaincront les malings, non seulement de calumnie, mais aussi de rage & de follie, car ils parlent si bien de quelle piété, de quelle sanctité, de quelle religion elle sentoit de la foy Chrestienne, que quiconques le niera il déclarera non seulement sa bestialle ignorance & resverie, mais aussi son impiété. Et où toutes ces choses ne pourroient oster de ton esprit la sinistre opinion que tu y as conçeue, & enracinée contre Marguerite, si ne me pourras tu nier ce que S. Jhean escrit : Bienheureux estre ceuls qui meurent au Seigneur.

Mais dy moy, je te pry, qui meurent ainsi que ceuls qui confessent Jésus estre le Christ, fils de Dieu, au sang duquel nettoiés de toutes nos ordures & reconciliés à Dieu, son père, & adoptés par Foy au nombre de ses enfants, sommes escripts héritiers en l’héritage céleste, qui est la vie éternelle ? Mais d’où nous vient il d’affermer & confesser