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VIE DE FREUDENBERG

pies de ses compositions, dont on lui demandait de nombreuses répétitions.

Auprès de Noël Hallé, habile & fécond peintre d’histoire, dès la première année de son séjour à Paris, Freudenberg avait perfectionné son instruction théorique & pratique ; &, comme à la même époque Hallé avait à faire un assez grand nombre de tableaux importants pour les églises de Paris & autres édifices publics, il fournit ainsi à celui qui étudiait assidûment auprès de lui l’occasion de s’éclairer sur l’invention, la composition, l’expression & le sentiment de la peinture, en le voyant chaque jour à l’œuvre.

Une des connaissances les plus utiles que fit Freudenberg parmi les artistes de la même époque fut celle de Boucher, premier peintre du roi, alors fort goûté, & qui a été depuis & pendant longtemps trop rabaissé. Boucher aimait à peindre comme en se jouant & d’un pinceau habile, mais plein d’afféterie, des Nymphes, des Néréides, des Vénus, des bergères & des bergers, en général des figures mythologiques empruntées aux poésies d’Ovide, mais habillées à la moderne. Ayant vu par hasard quelques-uns des paysages de Freudenberg, il trouva bon de se rapprocher de l’auteur de ces dessins, & alla même jusqu’à lui offrir de venir habiter chez lui, offre que Freudenberg ne crut pas devoir accepter. Cependant, bien loin de s’éloigner d’un peintre si heureusement doué & si populaire, il vint souvent le voir, afin d’étudier avec soin la collection très importante de dessins originaux des maîtres anciens & modernes que Boucher avait réunis. Freudenberg reçut de Boucher un très grand nombre de dessins de cet artiste, alors très chèrement payés & très recherchés, soit en pur cadeau, soit en échange des siens ; mais Boucher fit plus encore : non content de vanter le talent de Freudenberg, il contribua à lui procurer des commandes importantes. L’amitié d’un artiste alors dans tout l’éclat de son talent eut sur ce dernier une influence considérable, à ce point même que Freudenberg voulut imiter la manière de l’artiste français, si bien que, plus tard, dans