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XXVe NOUVELLE

bonté rend les Religieux & moy si confuz que auprès de luy ne sommes dignes d’estre appellez Religieux. »

La seur qui entendit ces paroles ne sçeut que croire, car, nonobstant que son frère fust bien mondain, si sçavoit elle qu’il avoit la conscience très bonne, la foy & l’amour en Dieu bien grande, mais de chercher superstitions ne cérémonies aultres que ung bon Chrestien doibt faire ne l’en eust jamais soupçonné. Par quoy elle s’en vint à luy & luy compta la bonne opinion que les Religieux avoient de luy, dont il ne se peut garder de rire avecq ung visage tel qu’elle, qui le congnoissoit comme son propre cueur, congneut qu’il y avoit quelque chose cachée soubz sa dévotion & ne cessa jamais qu’il ne luy eust dict la verité, ce qu’elle m’a faict mettre icy en escript, afin que vous congnoissiez, mes Dames, qu’il n’y a malice d’Advocat ne finesse de Religieux que Amour, en cas de nécessité, ne face tromper par ceux qui n’ont aultre expérience que de bien aymer, &, puis qu’Amour sçait tromper les trompeurs, nous aultres, simples & ignorans, le devons bien craindre.


— Encores, » dist Geburon, « que je me doubte bien qui c’est, si faut il que je dye qu’il est louable en ceste chose, car l’on veoit peu de grans Seigneurs qui