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Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome III.djvu/327

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LXXJe NOUVELLE

joues des myennes pour les me réchauffer. » Et en ce faisant il luy mist la main au tétin, dont elle cuyda faire quelque difficulté, mais la pria n’avoir poinct de craincte, car il fauldroit bien qu’ilz se veissent de plus près, & sur ces motz la print entre ses bras & la gecta sur le lict.

Sa femme, qui n’avoyt compaignye que de la croix & de l’eau beniste & n’avoyt parlé depuis deux jours, commencea avecq sa foible voix de crier le plus hault qu’elle peut : « Ha, ha, ha, je ne suis pas encore morte », &, en les menassant de la main, disoyt : « Meschant, villain, je ne suis pas morte. »

Le mary & la Chamberière, oians sa voix, se levèrent, mais elle estoit si despite contre eulx que la collère consuma l’humidité du caterre qui la gardoyt de parler, en sorte qu’elle leur dist toutes les injures dont elle se povoyt adviser. Et depuis ceste heure là commencea de guérir, qui ne fut sans souvent reprocher à son mary le peu d’amour qu’il luy portoyt.


« Vous voiez, mes Dames, l’hypocrisye des hommes, comme pour ung peu de consolation ilz oblyent le regret de leurs femmes.

— Que sçavez vous », dist Hircan, « s’il avoyt oy dire que ce fût le meilleur remède que sa femme povoit