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CROQUIS LAURENTIENS

« Nous sommes de pauvres pêcheurs, qui n’avons que le dimanche pour nous reposer et nous réunir. Nous n’avons pas comme nos frères du Canada, des fanfares joyeuses pour égayer notre fête nationale. Aujourd’hui, malheureusement, nous n’avons pas de pasteur, mais j’ai pensé que nous ne pouvions laisser passer l’Assomption sans rappeler le souvenir des aïeux, des martyrs de Grand-Pré. »

Et pour la centième fois, après tant d’autres, le jeune Acadien reprend pour ses compatriotes du Havre-aux-Maisons l’affreux récit que Longfellow, loyalement, a fait au monde entier dans une œuvre immortelle, et dont le temps qui efface tant de choses, n’a pu encore émousser l’horreur. Il évoque la vie paisible des ancêtres aux vallons d’Acadie, leurs grands domaines taillés dans les prées saumâtres de la Baie Française, leurs vertus et leur bonheur. Puis, c’est la guerre interminable dont l’Acadie est à la fois le théâtre et l’enjeu, les traités, les serments, les convoitises, les anxiétés, les souffrances. C’est enfin le crime sans nom, et le petit peuple qui monte au Calvaire !… Le feu, le sang, les larmes !… La fuite, sur les lointains océans, des vaisseaux de bois chargés de chair humaine, l’affreuse odyssée sous les ciels d’exil !…

Ces fillettes en indienne rose, aux cheveux sur les épaules, et qui ont apporté avec le rayon-