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CROQUIS LAURENTIENS

deux grandes richesses nationales, donnant à ses compatriotes une magnifique leçon de fierté. Paul à Jean a conquis complètement le cœur du Havre-aux-Maisons. Je lis cela en grosses lettres sur la figure d’un vieux pêcheur qui écoutait tout à l’heure, un croissant d’ombre sur les yeux, et qui est venu serrer la main du jeune homme, comme il descendait du seuil après une bonne heure de causerie familière.

Mais avant de quitter sa tribune d’occasion, Paul à Jean a présenté un autre orateur, un Acadien de Salem de passage sur les îles où il est né, et dont l’amusante faconde fait s’écraser les Madelinots pour ne rien perdre. Il parle un français où les particularités du dialecte acadien voisinent avec de terribles anglicismes, le tout servi avec une assurance d’outre-quarante-cinquième, beaucoup de gros bon sens et un très ardent patriotisme.

Salem fut l’un des remous où se rassemblèrent les épaves errantes du Grand Dérangement. Après deux siècles de souffrances et d’épreuves, les Acadiens y sont demeurés nombreux et se souviennent. Je ne résiste pas à l’envie de résumer en quelques lignes une anecdote du Salemois, anecdote charmante qui appartient à la tradition orale et où reparaît, légèrement modifié, le thème célèbre d’Évangéline.

Le héros de l’histoire est l’ancêtre des nombreuses familles Dugas de Salem. Déporté avec