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CROQUIS LAURENTIENS

vent rien, et seul, le levier de la prière, tout-puissant parce qu’opérant sur les causes secondes de toute éternité, est à notre commande. C’est pour cela, sans doute, que la petite Justine, l’enfant blonde aux gros bas blancs, égrenait son chapelet à l’heure de la messe. Les Ave, bien sûr, demandaient à la Vierge de mâter le vent, et les Pater, de pousser le maquereau.

Il y a peu de chaises sous l’appentis où l’on veille à la lampe. Les hommes sont assis où ils peuvent, sur le banc, sur les coffres, sur la boîte à charbon. Tout à coup le père Noël se lève, ouvre la porte qui donne sur la mer, et regarde les étoiles. Le silence se fait. Chacun suppute en son cœur les chances pour le lendemain !…

— Qu’est-ce que ça dit ? interroge Marie à Julien, quand le vieux a repris sa place sur la boîte à charbon.

— Peut-être bien que ça va beausir mais il y a encore trop de queues de vache dans le ciel !…

— Et les jeunesses ne sont pas arrivées ? dit quelqu’un.

— Ils ne s’ennuient pas à l’Étang-du-Nord ! C’est plus gai qu’ici… surtout quand il n’y a pas de poisson !…

Tous ensemble, obéissant au mot d’ordre tacite du réveille-matin qui marque dix heures, les veilleux se lèvent et sortent pour regagner