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On doit bien se garder d’exciter une femme,
Volontiers elle se courrouce, quand elle ne sait quelle réponse faire.
Bien est fou qui les aime sans aller à l’épreuve :
C’est celui qui sait (litt. saurait) distinguer le vieil or du neuf.
 
Il n’est ni sage ni courtois celui qui médit des femmes :
Car toute loyauté réside et se trouve en elles.
Je ne doute pas d’elles, quoiqu’on me dise sur leur compte
(Ou bien : Je ne refuse pas de les croire, quoi qu’elles me disent),
Pas plus que je ne douterais qu’en un grand feu mon doigt dût se brûler (ne se brûlât).

On pourrait y trouver un sens un peu différent en mettant un point au lieu d’une virgule après l’hémistiche, de cette manière :

Mult est fols qui les aime. Qui ne va à l’esprueve,
Ce fust cil qui seüst le vies or et le nueve.

qu’on traduirait : Bien fou est celui qui les aime. Celui qui ne va pas à l’épreuve, c’est celui qui connaît bien le vieux or et le neuf (et qu’on ne peut tromper). Mais ce serait peut-être un peu contourné.

XIX. a. — Il y a bien ni dans le ms., comme aussi au couplet suivant, vers a.

XIX. d. — La correction que j’ai proposée me semble indispensable. On pourrait tout au plus conserver le premier hémistiche, en admettant que rarsist pût avoir le sens actif ; encore l’inversion serait-elle un peu choquante.

XIX. 1. — Ni. Est-ce une erreur du scribe? Il est étrange qu’elle se reproduise au couplet suivant (XX. a.). Si l’on admet la légitimité de cette orthographe, il en résulterait que le mot ni ne se présenterait pas pour la première fois dans Froissart (XVe siècle), comme le veut M. Littré (Dictionnaire s. v. ni), puisqu’on le rencontre dans notre ms., qui date de la fin du XVIIIe siècle. Dans aucun cas, d’ailleurs, cela ne saurait infirmer les raisons qui portent à placer notre ms. à cette date.

XIX. 3. — Desist, de dixisset. On sait que l’imparfait du subjonctif français s’est formé du plus-que-parfait du subjonctif latin. Ici l's doit sans doute être prononcé dur (Cf. rarsist).

XIX. 4. — Rarsist. Imp. du subj. de rardre pour r’ardre, re-ardre, bas-latin reardere. L’ancienne langue formait avec une grande facilité des verbes composés à l’aide du préfixe re ou r’ devant une voyelle. Un grand nombre de ces composés sont aujourd’hui perdus.