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LAI DU FRÊNE.

l’office, au moment où l’abbesse sortoit de l’église, le portier vint vers elle pour lui conter son aventure. L’abbesse demande à voir cet enfant habillé de la même manière qu’il avoit été trouvé. On va le chercher, et la dame après l’avoir bien examiné, prévient qu’elle se chargera de son éducation, qu’elle l’élevera comme sa nièce. L’abbesse défend au portier de faire connoître la manière dont cet enfant avoit été abandonné et trouvé sur un frêne, dont le nom lui fut donné et qu’elle conserva. Enfin l’enfant fut nourri dans l’abbaye sous les yeux de l’abbesse, qui l’appeloit sa nièce. Quand Frêne fut parvenue à cet âge où la nature forme les jeunes personnes, elle surpassa en beauté et en amabilité toutes les demoiselles de la Bretagne. La bonté de son caractère, le charme de sa conversation, la faisoient chérir de tout le monde, et ses qualités surpassoient encore les graces de son visage. Elle étoit si bonne, si aimable, si bien élevée, elle parloit avec tant de douceur et de grace qu’on ne pouvoit la voir sans l’aimer et sans l’estimer. Il existoit à Dol un seigneur