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LAI DES DEUX AMANTS.

d’un comte, beau, bien fait et vaillant ; il résolut de tenter l’aventure et d’obtenir la main de la fille du prince. Ses biens étant situés dans le voisinage de la Vallée de Pistres, il venoit souvent à la cour du roi, y séjournoit même ; ayant vu la jeune personne, il ne tarda pas à l’aimer et à devenir éperduement amoureux. Il pria souvent cette belle de vouloir bien répondre à ses sentiments. L’amitié que portoit le roi au jeune comte, sa valeur, sa courtoisie, décidèrent la demoiselle en sa faveur. Tous deux renfermoient avec soin leur amour, et le déroboient à tous les yeux. Leur souffrance s’accroissoit chaque jour, lorsque le comte envisageant l’excès de ses maux, ne voulant rien hâter pour ne pas se perdre, vint trouver sa belle et lui dit : Si vous m’aimez, tendre amie, suivez mes pas, allons dans une autre contrée ; si je vous demande à votre père, connoissant l’amitié qu’il a pour vous, j’obtiendrai un refus ou bien