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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/184

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LA VILLE CHARNELLE


À midi, sous l’aiguille ardente et verticale
qui du fond de ton cœur monte droit au soleil,
tu t’arrêtes soudain, pour écouter
sonner en toi l’horloge immense de la terre,
en broyant le pain noir des souvenirs amers…
Et tu veux bien t’agenouiller sur le glouglou jaseur
d’un frais ruisseau, pour rafraîchir ton cœur
et pour presser contre tes joues passionnément
l’image vive et reflétée du paysage !

Quand le soleil piétine ses grappes de nuages
éclaboussant le ciel de courage et d’orgueil,
tes pensées vagabondes vendangent les collines
pour en tirer un vin doré de poésie.
La mélodie sereine de ta flûte apprivoise
le soleil qui s’accoude aux créneaux des montagnes,
en baissant son visage
où le sommeil efface les traces du carnage.
Tes brebis sont repues et rêvent de dormir