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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/212

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LA VILLE CHARNELLE

À gravir les degrés d’orgueil et d’or, géométriques.

C’est une Lune molle et souffrante et plaintive
Qui tombe de sommeil sur les bancs de l’allée,
Car elle a trop longtemps pleuré comme une eau vive
Sur la tombe sacrée de Schumann, mi-cachée
Sous la menthe sauvage et le thym aigrelet…
Car elle a trop longtemps chanté de sa voix grave,
Indolente et nerveuse,
Indécise et rêveuse et précise à la fois.

Mais ton cœur, ô poète, a réveillé la Lune
D’un grand sanglot d’amour déchirant le silence.
Et la voilà glissant sur les gazons soumis,
En te tendant ses bras soyeux, brillants et déliés,
Ses lèvres végétales
Et ses yeux frais, éclos sous la rosée des larmes.

Ô le spasme effréné de ce baiser lunaire !