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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/40

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LA VILLE CHARNELLE

comme un ventre de jeune femme épanouie.

Lézards émeraudés de la luxure,
beaux lézards assouvis de volupté solaire,
j’aime assister ainsi à votre lent réveil
sur le ventre dormant d’une place déserte,
dont la peau chaude est duvetée d’herbe vermeille.

Mais la dernière pierre du grand Soleil mulâtre
me chassa dans l’humide touffeur des bananiers.
Je longeai les coupoles fumantes dans l’azur,
m’arrêtant par instant pour embrasser les arbres
et les buissons de fleurs, à tâtons, à genoux,
pour baiser les racines de tous les arbrisseaux,
dont le parfum gonflait mon cœur,
quand j’atteignis l’orée
qui s’ouvre sur le ciel comme un quai sur la mer.
Mon âme s’embarqua sur la nue en partance
qui concéda sa toile au vent de l’infini.