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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/88

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LA VILLE CHARNELLE

et des marins roulent dans la houle,
comme des quartiers noirs et barbus de rocher.
Attelés à la file, avec un han véhément,
les marins goudronnés, à mi-corps dans la houle,
tirent lentement les carènes,
sous le râle fiévreux des antennes,
et le cri jaune des poulies qui se plaignent,
au flic-flac des ressacs…

Des bouches noires à l’inconnu des horizons,
ont soufflé leur morne désespoir.
Et les marins se hâtent dans la houle
en sentant sur leur cœur
les ténèbres mollasses qui traînent
comme des haillons pourris.
Les grandes vagues se brisent avec un cliquetis sinistre
d’épées que l’on aiguise ;
« Hissa-ho ! Hissa-ho ! »
Et les marins s’acharnent