Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/536

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

touchez. Je me connais en charmes. Ni sur la terre ni dans les cieux, je ne vois rien qui ne le cède aux vôtres. Combien de fois n’ai-je pas été tenté de me jeter à vos genoux ! Quelles délices pour moi d’aimer la Vertu, si je pouvais être aimé d’elle ! Eh ! pourquoi ne m’aimeriez-vous pas ? Que veut dire ce penchant qui me porte à vous, s’il n’annonce pas que vous y serez sensible ? Je sens que tout mon cœur vous est dû. N’avez-vous pas quelque répugnance à me refuser le vôtre ? Aimable Vertu, me fuyez-vous toujours ? Regardez-moi ! Vous ne me connaissez pas. C’est l’Amour à vos genoux qui vous parle. Essayez de le voir. Il est soumis : il ne veut que vous fléchir. Je vous aime, je vous le dis ; vous m’entendez ; mais vos yeux ne me rassurent pas. Un regard achèverait mon bonheur. Un regard ? Ah ! quel plaisir, vous me l’accordez. Chère main que j’idolâtre, recevez mes transports. Voici le plus heureux instant qui me soit échu en partage.

LA VERTU

, soupirant.

Ah ! finissez, Cupidon ; je vous défends de parler davantage.

L’AMOUR

Quoi ! la Vertu se laisse baiser la main ?

LA VERTU

Il va si vite que je ne la lui ai pas vu prendre.

MERCURE

Ce fripon-là m’a attendri aussi.

CUPIDON

Déesse, pour m’expliquer comme lui, vous plaît-il