Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/100

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dont il était question, ni qui pût la traiter de meilleure foi, ni avec plus d’abondance de sentiment qu’elle.

C’était de ces mères de famille qui n’ont de plaisir et d’occupation que leurs devoirs, qui les respectent, qui mettent leur propre dignité à les remplir, qui en aiment la fatigue et l’austérité, et qui, dans leur maison, ne se délassent d’un soin que par un autre. Jugez si, avec ce caractère-là, elle devait être contente de ma mère.

Je ne sais comment elle s’expliqua ; mais rarement on sert bien ceux qu’on aime trop. Elle s’emporta peut-être, et les reproches durs ne réussissent point ; ce sont des affronts qui ne corrigent personne, et nos torts disparaissent dès qu’on nous offense. Aussi ma mère trouva-t-elle Mme de Tresle fort injuste : Il est vrai que je n’aurais pas dû être si mal habillée ; mais c’est que la concierge, qui était ma gouvernante, avait différé ce matin-là de m’ajuster comme à l’ordinaire ; et il n’y avait pas là de quoi faire tant de bruit.

Quoi qu’il en soit, Mme de Tresle, qui depuis raconta ce fait-là à plusieurs personnes de qui je le tiens, s’aperçut bien qu’elle m’avait nui, et que ma mère nous en voulait, à elle et à moi, de ce qui s’était passé.

Trois semaines après, le marquis, qui avait dessein d’emmener sa femme à Paris, avant que sa grossesse fût plus avancée, reçut des nouvelles qui hâtèrent son voyage, Et comme, dans un départ si brusque,