Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/258

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parlait ainsi ; je n’avais pu les retenir à cet étrange discours, et n’étais pas même en état d’y rien répondre.

Mme Darcire, qui était la meilleure femme du monde, et qui avait pris de l’amitié pour moi, avait rougi plus d’une fois en l’écoutant, et s’était même aperçue que je pleurais.

Qu’appelle-t-on des houbereaux, monsieur ? lui dit-elle quand il eut fini. Il faut que Mme la marquise la jeune, toute fille de duc qu’elle est, soit bien mal informée, si elle rougit des alliances dont vous parlez ; je lui apprendrais, moi qui suis du pays de cette belle-mère qu’elle méprise, je lui apprendrais que la marquise, qui s’appelle de Tresle en son nom, est d’une des plus nobles et des plus anciennes maisons de notre province ; que celle de M. de Tervire, son premier mari, ne le cède à pas une que je connaisse ; qu’il n’y en avait point anciennement de plus considérable par l’étendue de ses terres ; et que, toute diminuée qu’elle est aujourd’hui de ce côté-là, M. de Tervire aurait encore laissé à sa veuve plus de dix-huit ou vingt mille livres de rentes, sans la mauvaise humeur d’un père qui les lui ôta pour les donner à son cadet, et qu’enfin il n’y a ni gentilhomme, ni marquis, ni duc en France, qui ne pût avec honneur épouser Mlle de Tervire, qui est cette fille qu’on n’a jamais vue à Paris, que Mme la marquise laissa effectivement à ses parents quand elle quitta la province, et sur qui aucune fille de ce pays-