Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/276

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les derniers besoins et dans l’obscurité la plus étonnante pour une femme comme moi. Qu’est-ce que c’est que la vie, et que le monde est misérable !

Eh ! mon Dieu, madame, lui répondis-je aussi touchée qu’il est possible de l’être, commencez donc, comme vous en a tant prié Mme Darcire, commencez par perdre de vue tous ces objets-là : je vous le répète aussi bien qu’elle, donnez-nous le plaisir de vous voir tranquille, consolez-nous nous-mêmes du chagrin que vous nous faites.

Eh bien ! voilà qui est fini, me dit-elle ; vous avez raison ; il n’y a ni adversité, ni tristesse que tant de bonté de cœur ne doive assurément faire cesser. Parlons de vous, mademoiselle ; où est cette mère que vous êtes venue retrouver, et qu’il y a si longtemps que vous n’avez vue ? Dites-m’en des nouvelles, est-ce que vous n’êtes pas encore avec elle ? Est-ce qu’elle est absente ? Ah ! mademoiselle, qu’elle doit vous aimer, qu’elle doit s’estimer heureuse d’avoir une fille comme vous ! Le ciel m’en a donné une aussi, mais ce n’est pas d’elle dont j’ai à me plaindre, il s’en faut bien. Elle ne prononça ces derniers mots qu’avec un extrême serrement de cœur.