Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/386

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ou six premiers jours que je fus dans la maison. Ma maîtresse même voulut me voir, sur le récit que ses femmes lui firent de moi.

C’était une femme qui passait sa vie dans toutes les dissipations du grand monde, qui allait aux spectacles, soupait en ville, se couchait à quatre heures du matin, se levait à une heure après-midi ; qui avait des amants, qui les recevait à sa toilette, qui y lisait les billets doux qu’on lui envoyait, et puis les laissait traîner partout ; les lisait qui voulait, mais on n’en était point curieux ; ses femmes ne trouvaient rien d’étrange à tout cela ; le mari ne s’en scandalisait point. On eût dit que c’était là pour une femme des dépendances naturelles du mariage. Madame, chez elle, ne passait point pour coquette ; elle ne l’était point non plus, car elle l’était sans réflexion, sans le savoir ; et une femme ne se dit point qu’elle est coquette quand elle ne sait point qu’elle l’est, et qu’elle vit dans sa coquetterie comme on vivrait dans l’état le plus décent et le plus ordinaire.

Telle était notre maîtresse, qui menait ce train de vie tout aussi franchement qu’on boit et qu’on mange ; c’était