Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/475

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nous n’avions pas encore dit une parole ; mais nous marchions de bon cœur. Je la soutenais avec joie, et le soutien lui faisait plaisir : voilà du moins ce que je sentais, et je ne me trompais pas.

Pendant que nous avancions sans parler, ce qui venait, je crois, de ne savoir par où commencer pour entamer la conversation, j’aperçus un écriteau qui annonçait à peu près ce qu’il fallait d’appartements à Mlle Habert, et je saisis ce prétexte pour rompre un silence, dont, suivant toute apparence, nous étions tous deux embarrassés.

Mademoiselle, lui dis-je, voulez-vous voir ce que c’est que cette maison-ci ? Non, mon enfant, me répondit-elle, je serais trop voisine de ma sœur ; allons plus loin, voyons dans un autre quartier.

Eh ! mon Dieu, repris-je, mademoiselle, comment est-ce donc que cette sœur a fait pour se brouiller avec vous, vous qui êtes si douce ? car on vous aimerait, quand on serait un Turc. Moi, par exemple, qui ne vous ai vu que d’aujourd’hui, je n’ai jamais eu le cœur si content. Tout de bon, Jacob ? me dit-elle. Oh ! pardi, mademoiselle, lui dis-je, cela est aisé à connaître, il n’y a qu’à me voir. Tant mieux, me dit-elle, et tu fais bien ; car tu m’as plus d’obligation que tu ne penses.