Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/90

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ils la voyaient affligée. À leur avis, il n’était question que de se taire quand elle serait mariée ; M. de Tervire le père pouvait être gagné ; il était d’ailleurs infirme et très âgé. Au pis aller, le caractère du fils ne laissait rien à craindre pour leur sœur, et sur tout cela ils appuyèrent les instances de leur ami d’une manière si pressante, ils importunèrent tant Mme de Tresle, qu’elle leur abandonna le sort de sa fille, et son amant l’épousa.

Seize ou dix-sept mois après, M. de Tervire le père soupçonna ce mariage sur bien des choses qu’il est inutile de vous dire ; et pour savoir à quoi s’en tenir, il ne sut que s’adresser à son fils, qui n’osa lui avouer la vérité, mais qui ne la nia pas non plus avec cette assurance qu’on a quand on dit vrai.

Voilà qui est bien, lui répondit le père ; je souhaite qu’il n’en soit rien ; mais si vous me trompez, vous savez ce que je vous ai dit là-dessus, et je vous tiendrai parole.

Le bruit court que Tervire est marié avec votre cadette, dit-il à Mme de Tresle qu’il rencontra le lendemain, et supposons que cela soit, je n’en serais pas fâché si j’étais plus riche ; mais ce que je puis lui laisser ne suffirait plus pour soutenir son nom, et il faudrait prendre d’autres mesures.

L’air déconcerté qu’elle avait en l’écoutant acheva sans doute de lui confirmer ce mariage, et il la quitta sans attendre de réponse.

Dans le temps qu’il tenait ces discours, et qu’avec la