Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/349

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Le Chevalier.

Ce n’est qu’un seul mot qui m’arrête.

La Marquise, avec un peu d’embarras.

Je ne puis deviner, si vous ne me le dites.

Le Chevalier.

Tantôt je m’étais expliqué dans un billet que je vous avais écrit.

La Marquise.

À propos de billet, vous me faites ressouvenir que l’on m’en a apporté un quand vous êtes venu.

Le Chevalier, intrigué.

Et de qui est-il, madame ?

La Marquise.

Je vous le dirai. (Elle lit.) Je devais, madame, regretter Angélique toute ma vie ; cependant, le croiriez-vous ? je pars aussi pénétré d’amour pour vous que je le fus jamais pour elle.

Le Chevalier.

Ce que vous lisez là, madame, me regarde-t-il ?

La Marquise.

Tenez, chevalier, n’est-ce pas là le mot qui vous arrête ?

Le Chevalier.

C’est mon billet ! Ah ! marquise, que voulez-vous que je devienne ?

La Marquise.

Je rougis, chevalier ; c’est vous répondre.

Le Chevalier, lui baisant la main.

Mon amour pour vous durera autant que ma vie.

La Marquise.

Je ne vous le pardonne qu’à cette condition-là.