Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/561

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Lisette, je ne saurais, tu le vois bien ; c’est une entrevue qui inquiéterait la marquise, et madame la comtesse est trop raisonnable pour ne pas entrer dans ce que je dis là. D’ailleurs, je suis sûr qu’elle n’a rien de fort pressé à me dire.

Lisette.

Rien, sinon que je crois qu’elle vous aime toujours.

Arlequin.

Et bien tendrement malgré la petite parenthèse.

Dorante.

Qu’elle m’aime toujours, Lisette ! Ah ! c’en serait trop, si vous parliez d’après elle, et l’envie qu’elle aurait de me voir, en ce cas-là, serait en vérité trop maligne. Que madame la comtesse m’ait abandonné, qu’elle ait cessé de m’aimer, comme vous me l’avez dit vous-même, passe ; je n’étais pas digne d’elle ; mais qu’elle cherche de gaieté de cœur à m’engager dans une démarche qui me brouillerait peut-être avec la marquise, ah ! c’en est trop, vous dis-je. Je ne la verrai qu’avec la personne que je vais rejoindre.

(Il s’en va.)
Arlequin, le suivant.

Eh ! non, monsieur, mon cher maître ; tournez à droite, ne prenez pas à gauche, venez donc. Je crierai toujours jusqu’à ce qu’il m’entende.



Scène VI

LISETTE, un moment seule ; LA COMTESSE.
Lisette.

Allons, il faut l’avouer, ma maîtresse le mérite bien.