Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/72

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Frontin.

Je l’ai rencontrée ce matin qui étouffait un soupir en s’essuyant les yeux.

Lisette.

Elle qui aimait sa sœur, et qui était toujours avec elle, je la vois aujourd’hui la fuir et se détourner pour l’éviter. Qu’est-ce que cela signifie ?

Frontin.

Et moi, quand je la salue, elle a toujours envie de me le rendre. D’où vient cela, sinon de l’honneur que j’ai d’être à vous ?

Lisette.

Tu n’as peut-être pas tant de tort. Au moins, monsieur, je vous demande le secret ; profitez-en, voilà tout.

Damis.

Je vous l’avoue, Lisette, tout ce que vous me dites là, si vous êtes sincère, pourrait m’être d’un bon augure ; et si j’osais soupçonner la moindre des dispositions dans son cœur…

Frontin.

Iriez-vous lui donner le vôtre ? Ah ! monsieur, le beau présent que vous lui feriez là !

Damis.

Écoutez ; c’est pourtant cette même personne qui, au premier instant qu’elle m’a vu, a marqué assez nettement de l’aversion pour moi, qui m’a fait soupçonner qu’elle aimait ailleurs !

Lisette.

Purs discours de mauvaise humeur qu’elle a tenu là, je vous assure.