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Page:Marmette - François de Bienville, scènes de la vie canadienne au 17è siècle, 1870.djvu/161

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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

danger inutile. Les larmes lui venaient aux yeux quand il ajoutait, qu’il avait maintes fois endormi dans ses bras François de Bienville enfant, en lui chantant une ballade des temps passés.

Au sortir de chez M. LeMoyne, Pierre se fit coureur des bois, par goût d’abord, ensuite par nécessité. Pendant huit ans, il battit les immenses forêts du Canada, des colonies anglaises et de la Louisiane, tantôt chassant, guerroyant, bivouaquant ou dormant sous un ouigouam ami, tantôt poursuivi, traqué, serré de près par les Iroquois qui le connaissaient tous à la justesse de son coup de feu et à la force musculaire de ses bras puissants.

Mais les lois étant devenues très-sévères, en ce temps là, contre les coureurs des bois, et la famille LeMoyne lui ayant offert une charge de fermier, Pierre accrocha son vieux mousquet dans la cuisine de son ancien maître ; c’était en 1689.[1]

Un des premiers à s’enrôler l’année suivante, il obtint de servir dans la compagnie de la marine dont M. de Maricourt était capitaine et Bienville enseigne.

Vrai type de ces bons serviteurs d’un temps qui n’est plus, Pierre avait voué un attachement sans bornes à ses maîtres, et ne se sentait heureux qu’en autant qu’il les pouvait partout suivre et servir.

Voici maintenant par quelle circonstance il était absent de son poste dans l’après-midi du dix-huit et qu’il avait assisté à l’engagement qui eut lieu à la Canardière entre les Canadiens et les Anglais.

M. de Frontenac voulant garder près de lui les Québecquois pour la défense de la place, envoya,

  1. M. Charles LeMoyne était mort quelques années auparavant.