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histoire des églises et chapelles de lyon

terie et le sabre achevèrent les blessés : cela se passait le 3 décembre 1793. En 1795, lorsque la tempête révolutionnaire commença à s apaiser, on éleva, au lieu même où avaient été immolées tant d’illustres victimes, un cénotaphe magnifique dont nous empruntons à Delandine une description d’autant plus nécessaire, que rien ne subsiste plus de ce premier monument. Cette description minutieuse a beaucoup de prix malgré la pompe démodée du style : c’est ce qui nous engage à en donner de larges extraits, ainsi que la relation, par le même, de la cérémonie d’inauguration.

Intérieur du Monument des Brotteaux.

« Sur une large base, s’élevant en amphithéâtre, reposait un immense cercueil dont la blancheur contrastait avec les draperies lugubres placées à l’entour. Ces draperies étaient suspendues par des festons de lauriers, de chênes et de roses : ils eurent droit à des lauriers puisqu’ils combattirent pour ce pays, à des couronnes de chêne puisqu’ils surent être citoyens, et à des fleurs de rose puisque cette fleur odorante fut, chez tous les peuples, l’emblème des vertus, le symbole de cette vie passagère qui ne brille un instant que pour disparaître pour toujours. Aux quatre coins du monument des larves, génies fixés (sic) par les Égyptiens et ensuite par les Grecs, soulevant avec la tête les assises de pierre de la voûte supérieure, semblaient considérer, avec un douloureux étonnement, quels étaient ceux qui osaient troubler le silence de cette tombe, réveiller les mânes lyonnais et faire pénétrer une faible clarté dans les ténèbres éternels (sic). Au-dessous de ces génies funèbres, des hiboux, oiseaux de nuit, sortaient effrayés du sépulcre et formaient quatre groupes qui soutenaient les thurifères, vases où brûlaient les parfums et l’encens. De la coupole du tombeau s’élevait une pyramide portant l’urne fatale, objet de tous les regrets : au piédestal, deux femmes voilées étaient sculptées, tenant des lacrymatoires et paraissant abîmées dans le désespoir. »

L’inauguration du monument fut très imposante. « Six mille hommes précédés d’une musique funèbre ont fait le tour du monument, l’arme basse et dans le recueillement le plus profond ; un peuple immense, les yeux baignés de larmes les entourait. Pendant cette pompe funèbre, une couronne perlée, par un effet singulier et rare, entoura le soleil resplendit dans les cieux et sembla couronner la fête, les spectateurs et le tombeau. Ce phénomène eût paru à nos aïeux le signe certain de la gloire de nos concitoyens. Des mains, longtemps enchaînées, élevèrent le cénotaphe au souvenir de leurs compagnons d’infortune ; Chinard en sculpta les ornements et les statues ; l’architecte Cochet, plein