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histoire des églises et chapelles de lyon

d’intérêt public ». Depuis le jour de l’échange des signatures, c’est-à-dire depuis le 11 décembre 1826, il n’avait jamais été soufflé mot d’une revendication quelconque : l’idée du corps de garde avait été abandonnée ; on avait probablement reculé devant l’inconvenance de loger, sous le même toit que des prêtres et à la porte d’une église, des plantons de police, si utile que puisse être parfois leur intervention. La fabrique avait joui de son usufruit entier et traité, pour ses baux avec les locataires, sans intervention de personne. Elle y avait quelque droit ; car la municipalité avait sans doute payé l’immeuble Rhenter 40.000 francs et de plus avancé 5.000 autres francs, pour les réparations, mais les agrandissements, les constructions nouvelles, l’aménagement général, une échoppe achetée de Mme Desgranges, sur laquelle on avait prolongé le bâtiment, n’avaient pas exigé moins de 60.000 francs, tirés exclusivement de la caisse paroissiale. Son bénéfice de jouissance n’était donc pas absolument gratuit et une prescription, au moins morale, favorisait sa sécurité. L’adjoint, chargé de l’affaire, ne réclamait pas moins que l’arriéré des loyers, échus depuis soixante ans ; il soutenait n’avoir pas à se préoccuper d’un bail, qui n’était pas revêtu du consentement indispensable d’un des propriétaires, et il menaçait de s’emparer, de force, de la partie de l’immeuble, stipulée au contrat primitif. Je me demande comment le tribunal aurait jugé des conclusions aussi énormes, découlant d’un privilège, sinon discutable en fait, du moins périmé, en apparence, par un non-usage perpétuel. On préféra transiger et, après entente avec l’avoué de la ville, M. Pondevaux, et l’avocat de la fabrique, M. Pézerat, on convint d’une indemnité de 5.000 francs et que la moitié du prix du loyer du magasin Poggi, en attendant la fin de la location, serait versé au receveur municipal.

Telle fut l’escarmouche de début : les suivantes auront une importance et un retentissement beaucoup plus significatifs. Il s’agira, non plus de quelques mètres carrés du rez-de-chaussée à détacher, mais du presbytère tout entier. Ce presbytère, on s’en souvient, formant corps avec l’église, servant de prolongement au côté nord-ouest de la façade, devenait sujet à démolition, par la transformation du quartier Grôlée ; il tombait sous le coup de l’expropriation pour utilité publique. Dans quelles conditions se traiterait cette opération ? On soupçonne les anxiétés, les transes, dirai-je, du curé Méchin et de son entourage. Dans la séance municipale du 27 mars 1888, M. Gailleton, maire de Lyon, avait lu son rapport sur la nécessité d’assainir « ces ruelles malsaines, noires et privées d’air, d’un contraste si frappant avec la rue de la République et le quai du Rhône ». Il avait entraîné ses collègues à une œuvre qu’il proclamait « digne d’une municipalité éclairée ». Nous n’avons pas à raconter ici, à la suite de quelles combinaisons et de quels traités, une société financière parisienne, dont M. Stanislas Ferrand, architecte-expert, était le principal régent, parvint à être chargée de l’entreprise et de la réalisation du plan Clair, Bernoud et Duret, qui avait eu la préférence sur celui de MM. Bissuel et André. On voudra seulement ne pas oublier que M. Méchin, dans le cours des discussions, aura devant lui deux interlocuteurs, au lieu d’un, M. Gailleton et M. Ferrand, et qu’après avoir convaincu le premier, il lui arrivera à peu près toujours de ne pas gagner le second, ou réciproquement. Les documents, assemblés sur ces épineux incidents par M. Méchin, nous apprennent qu’il fut touché, dès le 13 avril 1890, par une lettre de l’administrateur de la