Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/121

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— « Et après ? » fit doucement l’abbé.

— « Après ? »

— « Je suppose que votre père rappelle Jacques à Paris : qu’en fera-t-il, après ? »

Antoine se troubla. Il avait bien son projet, mais il ne savait comment l’exposer, tant il lui semblait difficile d’en faire admettre le principe à l’abbé : quitter l’appartement familial ; s’installer, Jacques et lui, au rez-de-chaussée de leur maison ; soustraire presqu’entièrement l’enfant à l’autorité paternelle ; se charger, à lui seul, de diriger l’éducation, de contrôler le travail et de surveiller la conduite de son cadet. Cette fois le prêtre ne put s’empêcher de sourire ; mais son sourire était sans ironie.

— « Vous assumeriez là une tâche bien lourde, mon ami ».

— « Ah », répliqua Antoine, avec feu, « j’ai tellement la conviction que ce petit a besoin d’une très grande liberté ! Qu’il ne se développera jamais dans la contrainte ! Moquez-vous de moi, M. l’abbé, mais je reste convaincu que si j’étais vraiment tout seul à m’occuper de lui… »

Il n’obtint du prêtre qu’un nouveau hochement de tête, suivi d’un de ses regards