Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/405

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de rien. Hitelrao me répéta que je n’aurois point d’escorte et je le quittai en lui disant que je m’en passerois. Le soir même, Hitelrao m’envoya son divan. Après bien des circonstances tendantes à me prouver que le prince n’avoit pas le sol, ce que je savois très bien, et qu’il ne subsistoit que par la générosité d’Hitelrao, nous en vînmes enfin à conclure qu’il me donneroit un détachement de cavalerie et que je lui passerois un billet[1] au nom de M. de Bussy, pour l’argent que j’avois reçu. Il fallut bien en passer par là. J’avois près de cent cosses de pays djate à traverser, ce que je me trouvois hors d’état de faire sans la protection des Marates.

Notre prochain départ pour le Dékan fut bientôt répandu dans l’armée ; il n’étoit guères possible de le tenir secret, et notre petite troupe en paroissoit enchantée. Des soldats venoient de tems en tems sur mon passage me demander comme aux officiers : « Mon général, est-il bien vrai que nous partons pour le Dékan ? Oui, mes enfants, oui, répondois-je. » Surquoi ils s’en retournoient chantant et dansant, de sorte que je me flattois de quitter Dehly sans perdre un seul homme par désertion ; je me trompois, la moitié de nos soldats ne demandoit pas mieux, mais l’autre moitié ne me faisoit des questions que pour savoir à quoi

  1. [Ce billet n’a pas paru depuis : Olkarmollar a qui j’en avois écrit, aura sans doute eu honte de le faire présenter.]