Page:Martinov - De la langue russe dans le culte catholique, 1874.djvu/72

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auxquels elle pourrait opposer des défenseurs également libres, mais bien le calme plat du silence et de l’inaction, ce repos qu’elle trouve à l’ombre de la protection spéciale qui la dispense de la peine de se défendre et de se régir par elle-même. C’est l’expérience de plus d’un siècle et demi qui nous l’a appris à nos dépens, et nous pouvons dire au juste ce qu’à coûté à l’Eglise cette suprême protection qui s’est chargée de veiller à la conservation de ses dogmes, de son orthodoxie et de sa discipline. Le jour où les sentinelles postées à l’entrée de notre Église seront levées, ce sera le commencement non de sa dissolution, mais de sa régénération ; car, en émancipant la conscience individuelle, le gouvernement voudra ne pas oublier que la conscience collective de l’Eglise entière n’a ni moins de droit à la liberté, ni moins besoin d’en jouir que la première. L’Église perdra, il est vrai, la protection spéciale du gouvernement ; mais, en revanche, elle échappera à la mort que donne cette tutelle et retrouvera avec la liberté de la parole celle de se gouverner et de se défendre par elle-même. » (Les Marches de la Russie, t. IV, p. 48, Berlin, 1874.)

Notre tâche est terminée. Nous avons envisagé la question dont il s’agit sous ses faces diverses, autant que le permettait le cadre restreint de notre travail. Après une étude préliminaire sur le pays et les peuples que la question intéresse directement, nous en avons retracé l’historique et les débats qu’elle a suscités dans les sphères administratives ; enfin nous avons examiné la question elle-même, dans son origine et sa source, que nous avons trouvées viciées, dans son application, que nous avons démontrée odieuse, et dans ses conséquences, qui nous ont paru funestes aux âmes et fatales à la religion catholique.

La conclusion à tirer s’offre d’elle-même ; elle est défavorable à l’introduction du russe dans le culte catholique. En d’autres circonstances, nous serions les premiers à prendre la défense de la mesure que nous avons le grand regret de devoir combattre aujourd’hui ; et l’affection que nous avons toujours témoignée pour notre langue maternelle nous permet d’espérer qu’on verra dans le verdict prononcé contre elle l’expression d’une profonde conviction et d’un devoir de conscience, devoir d’autant plus rigoureux que certains organes de la presse russe m’ont attribué à ce sujet des sentiments qui ne sont point les miens.